Vive la neige (ca cest passer a coter de chez moi!!)

Le lundi 10 mars 2008


«On est en train de perdre la ville!»

Varennes aurait bien pu vivre sa deuxième tragédie en moins d'une semaine. Mardi dernier, la ville a été éprouvée par le décès du jeune pompier Mathieu Émond, mort en combattant un incendie. Et dans la nuit de samedi à hier, les longs rideaux blancs qui voilaient la chaussée ont provoqué des sorties de routes. Non par dizaines, mais par centaines.

Peu après 22h, des rafales de 100 km/h ont poussé la neige sur les routes, effaçant en quelques minutes une journée de déneigement. Le tapis blanc a épaissi presque à vue d'oeil pendant que la visibilité devenait nulle. Même les conducteurs les plus expérimentés ont été pris au piège.

À un certain moment, 300 véhicules étaient pris dans la neige. Parmi eux, trois des quatre voitures de police disponibles sur le territoire de Varennes, une déneigeuse, un camion de pompier et des ambulances. Une soixantaine de voitures croupissaient sur la route 132, qui mène à Boucherville. Et en tentant de gagner l'autoroute 30, une cinquantaine d'autres sont restées coincées sur la montée de la Picardie, qui traverse un vaste champ balayé par le vent.

Les pompiers de Varennes se sont postés aux entrées de la ville pour empêcher les automobilistes d'aller plus loin. Et la Ville a transformé une école et un centre communautaire en dortoirs géants. Mais les routes étant toutes bloquées, la Croix-Rouge n'était pas en mesure de livrer quelques couvertures. La ville de Varennes était laissée à elle même.

Malgré tout, le maire adjoint Michel Lyons avait le sourire fendu jusqu'aux oreilles, lorsque La Presse l'a rencontré. «C'était vraiment la catastrophe», raconte-t-il en riant, les yeux rougis par une très courte nuit de sommeil.

S'il en rit, c'est que la population a mis l'épaule à la roue pour empêcher un drame. Un club de motoneiges a dépêché deux bénévoles avec leurs machines pour secourir les conducteurs coincés. Le propriétaire d'un magasin de sport local a prêté deux autres motoneiges aux secouristes. Un marchand a offert matelas, couvertures et sacs de couchage aux rescapés. Et un restaurant a fourni des thermos de café aux secouristes qui arpentaient les routes à la recherche de sinistrés.

Ce sont peut-être ces mesures exceptionnelles qui ont permis à France D'Amour de se tirer d'impasse. La chanteuse croyait halluciner lorsqu'elle a pris la route après un spectacle à Contrecoeur. «Je n'avais jamais vu ça, a-t-elle confié. Et pourtant, j'ai arpenté le Québec du nord au sud, de l'est à l'ouest.»

Ses musiciens et elle ont fait la file indienne jusqu'aux portes de Varennes, où les pompiers leur ont demandé de ne pas aller plus loin. C'est finalement un résidant de la ville, ami de son guitariste, qui lui a offert l'hospitalité.

Marcel Filteau, lui, arrivait de Montréal, où il avait assisté à une exposition. Il était l'un des rares à avoir réussi à se frayer un chemin parmi les voitures abandonnées. «Dans les années 1970-1972, on en a eu de la neige, mais pas comme ça», raconte ce résidant de Contrecoeur, qui a été contraint de passer la nuit dans un centre communautaire. Son épouse et lui ont finalement gagné leur maison sains et saufs en matinée.

Près de 300 personnes ont passé la nuit dans les abris de fortune de Varennes.

Après cette nuit mouvementée, pompiers, policiers et plusieurs dizaines de personnes se sont présentées à l'hôtel de ville hier pour présenter leurs respects au défunt Mathieu Émond, dont la dépouille était exposée en chapelle ardente. Un événement triste, certes, mais embelli par un effort collectif qui a permis d'empêcher des dizaines d'autres tragédies.

Les funérailles du pompier auront lieu cet après-midi.